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Santé mentale : « chacun de nous peut souffrir de troubles »

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Ce titre est paru dans la Tribune de Genève du mardi 11 octobre 2016. Il nous informe que la moitié de la population suisse souffre de troubles psychiques, c’est-à-dire qu’une personne sur deux serait atteinte dans sa santé mentale au moins une fois dans sa vie. 17% de la population souffre d’un ou de plusieurs troubles psychiques (chiffres officiels 2015 de l’OMS) : cela interpelle véritablement ! D’autant plus lorsqu’il est rajouté que ce phénomène est devenu un véritable problème de santé publique qui coûte chaque année plus de 7 milliards de francs à la société !

Dans cette période où l’on parle – une fois encore – de la prochaine augmentation des primes d’assurances maladies, que différents politiques se questionnent sur la manière de faire baisser ou mieux gérer les coûts, que l’on évoque à nouveau la possibilité d’une caisse unique, il serait intéressant de voir combien d’hospitalisations « sociales » ont lieu chaque année. Une simple visite au chevet d’un malade à l’hôpital, ou le passage dans un couloir d’unité de soins, permet de constater qu’à part les patients victimes d’accidents, de maladies, chroniques ou non, nombre de personnes sont là parce qu’elles sont affectées psychiquement ; une perte d’emploi, des difficultés familiales, et le fait que nous ne sommes pas tous armés de la même manière contre les difficultés, peut se transformer en une atteinte psychique persistante. « Les aléas de la vie peuvent parfois provoquer un désarroi, une perte de confiance, voire la perte du goût à la vie »(…).

Alors qu’est-ce que l’on fait concrètement pour aider ces êtres humains en détresse ? Qu’est-ce qui peut être proposé pour ces « Ã©corchés de la vie », autre que les traditionnelles prescriptions de médicaments, consultations psychiatriques ou autres thérapies, qui de toute façon généreront un coût ? L’hospitalisation est bien souvent l’ultime solution, avec la mise en place de tout « l’armada » que je viens de citer. Et c’est alors un « défilé » de patients désÅ“uvrés qui sont accueillis : bouleversements émotifs ou intellectuels qui affectent leur santé, perturbation de leur comportement social, parfois même des problèmes d’alcool ou d’abus de substances diverses s’ajoutent encore à leur détresse ou leur état mental.

A l’hôpital Beau-Séjour notamment, il existait autrefois une opportunité complémentaire aux soins habituels, qui permettait aux usagers de parler de leurs difficultés, trouver une écoute de qualité dans un lieu privilégié, sans jugement aucun et en toute convivialité. Il s’agissait de l’Atelier d’Animation dans le Pavillon Louis XVI, le centre de loisirs pour les patients, directement intégré à cette annexe des HUG (supprimé, je le rappelle, depuis l’été 2014…). Grâce à la disponibilité des travailleurs sociaux, des auxiliaires bénévoles et des stagiaires/étudiants de la HETS, ils étaient encouragés en premier lieu à s’ouvrir au dialogue, à découvrir ou retrouver le goût aux loisirs et aux échanges sociaux, entre les périodes de soins et de thérapies.

Les multiples activités récréatives qui étaient proposées aux patients durant leur séjour n’étaient pas destinées uniquement à offrir un simple « divertissement » (pourtant bienvenu), mais avaient comme objectif de leur permettre de recréer des liens, retrouver des sensations plaisantes, renouer avec la vie culturelle et ses valeurs, donner un nouveau sens à leur existence et surtout retrouver leur place dans la société. La musique et les concerts, les spectacles ou performances artistiques, les sorties-excursions, séances de cinéma et autres organisations internes éveillaient la curiosité : ces animations étaient le prétexte pour « débloquer » ou faire sortir de leur mutisme certains patients, afin qu’ils effectuent un premier pas vers une resocialisation. Même les jeux de société, ou les simples rencontres autour d’un café et d’une tranche de gâteau à l’espace de détente, suscitaient un début d’ouverture à de meilleures sensations. En outre, toutes les fêtes du calendrier étaient naturellement célébrées.

Une fois leur moral « boosté » avec le support des activités socioculturelles, les animateurs indiquaient alors aux usagers qui fréquentaient l’Atelier les possibilités offertes à l’extérieur de l’hôpital : maisons de quartiers, centres de loisirs et de rencontres, clubs d’aînés, qui sont à disposition dans de nombreux endroits de la ville et du canton. La FASe gère en effet plus d’une trentaine d’espaces de rencontres ouverts sur le quartier et la commune. Il leur était mentionné également les occasions d’effectuer des activités de bénévolat, dans différents domaines, car certains d’entre eux voulaient conserver une activité sociale, valorisante, se sentir moins seuls et surtout être utiles à la communauté. Là aussi de nombreuses adresses d’associations et de groupements divers leur étaient proposées.

« Ayant été hospitalisé à Beau-Séjour de longues semaines, mon moral en a pris un coup. Heureusement, les animateurs dynamiques et compétents et les bénévoles, m’ont offert un soutien, une écoute et une chaleur humaine exceptionnelle. Les infirmières n’ont plus le temps de discuter avec les patients aujourd’hui, elles sont tout le temps « débordées ». Votre atelier d’animation organisait des concerts remarquables, la fête de la Musique avec le Vieux Carré, des kermesses dans le parc et bien d’autres activités qui nous permettaient de nous « déconnecter » de nos douleurs et nos affections. » (Stefan D. rubrique ‘commentaires’ site TdG du 18.07.2014)

Certaines personnes à l’origine de la suppression de l’animation n’ont certainement pas mesuré, à sa juste valeur, la contribution indéniable de cette activité au processus de guérison ou d’amélioration de l’état physique, et surtout psychique, des patients traversant cette épreuve difficile que représente une hospitalisation. C’est une expérience très marquante, notamment à cause de son contexte quotidien de maladie et de souffrance auquel personne n’est préparé. Sans vouloir ressasser sur le sujet de cette disparition des activités de loisirs et de détente en milieu de soins, le préjudice majeur sur la collectivité c’est que les patients se sont vus privés du jour au lendemain d’un lieu de ressourcement et de réconfort, et qu’aucune alternative bénéfique pour leur moral n’a été envisagée.

Profiter de l’hospitalisation pour « réorienter » et donner des repères aux personnes affectées dans leur santé mentale, offrir cette opportunité de leur faire découvrir des activités socioculturelles qui font du bien, bénéficier de ce petit « supplément d’âme » que représente l’animation au cours du séjour en institution. Ce serait intéressant de savoir ce qu’en pensent les associations d’action pour la santé psychique en quête de solutions pour freiner cet important problème de santé publique. Lorsqu’il en existe, certaines sont parfois supprimées au lieu d’être valorisées…

Les Aumôniers de l’hôpital avaient tout compris, à l’époque : ce sont eux qui ont initié l’animation à Beau-Séjour notamment, et ceci bien avant les années 80. Faisant preuve de charité chrétienne et d’empathie, ils avaient déjà repéré l’importance d’une structure parallèle aux soins, procurant aux malades (outre la relation et les contacts attentionnés des intervenants) du tonus et de l’énergie nécessaires pour relever les défis journaliers et les aider à reprendre les rênes de leur vie.

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Photo du profil de Jean-Pierre TAUXE
Décorateur de premier métier ; une expérience d'une année dans les coulisses du Cirque Knie pour écrire un premier livre ; formation d'éducateur sport et loisirs pour personnes en situation de handicap ou en difficulté d’adaptation, puis de maître socio-professionnel à l'EESP de Lausanne.

Il reprend plus tard la responsabilité de l'Atelier d'Animation à l’Hôpital Beau-Séjour. En août 2013, il partait en préretraite après 23 ans de "bons et loyaux services". L’Atelier qu'il animait, cher aux patients hospitalisés qui bénéficiaient ainsi d'instants de loisirs et de moments de répit bénéfiques à leur moral, a été maintenu à 50% durant une année après son départ. Menacé de fermeture à cause de "projets institutionnels" et "mesures d'économies" aux HUG, ce centre a pourtant disparu en juillet 2014, avec le départ du second animateur à temps partiel. Les premiers articles de cette rubrique (numérotés) abordent le sujet.

Jean-Pierre Tauxe a alors publié un autre ouvrage, qui retrace ses deux décennies à la tête de l'espace de loisirs de Beau-Séjour : rétrospective d'événements exceptionnels, organisations socioculturelles originales, récits et anecdotes et également nombre de témoignages de patients.

Ce livre peut être commandé en laissant les cordonnées sur le site  http://jean-pierretauxe.wixsite.com/atelierdanimation  rubrique en bas de page "Plus d'Info".

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