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Genève-Plage, une vie au soleil

Genève-Plage, une vie au soleil

Aux pieds de Cologny, une clientèle «feutrée» se mêle aux excentriques et inconditionnels des bains publics. Reportage avant que l’été ne s’achève.

S’il fallait retenir un lieu où se manifeste l’esprit rive gauche, ce pourrait être celui-ci: Genève-Plage. La pelouse à l’anglaise raccorde le lac aux beaux quartiers. Les peaux brunies s’exposent devant les cabines individuelles. Coté Genève, les mères de famille et leurs petits assiègent les piscines. Plus en amont, elles enlèvent le haut et gardent parfois le minimum syndical en bas. Qu’ils semblent lointains les corps qui s’entassent inconfortablement à Baby-Plage. Qu’il semble lointain l’esprit «popu» des Pâquis et leurs bains.

C’est vrai. Genève-Plage, c’est une tout autre attitude, une ambiance plus feutrée. Pour la société genevoise, il est de bon ton de s’y montrer», commente Teddy Nicolier en séchant face au soleil. L’homme à la retraite fut directeur de 1988 à 1999. Il dispose d’une cabine à vie – il faut dire qu’il est affublé du titre de directeur honoraire – et maintient un regard attentif sur sa plage, sa piscine ou ce toboggan qui rend fous les gamins. «Le produit n’est pas le même que les autres plages», assure-t-il pour justifier les 7 francs que coûte l’entrée plein tarif. «Mais Genève-Plage n’a jamais perdu son côté familial et ouvert.»

La cabine d’Ali Baba

Pour se laisser convaincre que ces deux hectares ne sont pas une zone VIP à l’ombre des peupliers, il suffit d’aller voir les joueurs de carte. Marguerite, 82 ans, en est la mascotte et interrompt volontiers sa partie de chibre pour raconter la cinquantaine d’étés passés à Genève-Plage. «Tant que je pourrai, je viendrai ici», dit-elle. Ses amis du club Gyms-Nageurs n’en disent pas moins. Tout comme les joueurs de pétanque qui, malgré les nombreux déplacements de leurs terrains, sont restés fidèles. «Les sociétés sportives ont toujours eu une forte emprise sur Genève-Plage, explique Teddy Nicolier. Les nageurs, les joueurs de pétanque ou de ping-pong: c’était leur plage. La direction savait qu’il fallait faire avec», sourit-il.

Monique aussi semble faire sa loi. La cabine 26, c’est la sienne depuis dix-sept ans. Un véritable magasin de plage de trois mètres carrés, orné de coquillages, de bibelots en rotin et de quoi faire passer la soif. Année après année, elle l’occupe dès le premier jour de la saison jusqu’au déchirement de la fermeture de septembre. A la manière d’une vahiné, Monique porte le collier de fleurs. «A un moment de ma vie, il me fallait une échappatoire. Vu que je ne pouvais pas me payer les Maldives, je suis venue à Genève-Plage», raconte-t-elle.

Le soir venu, les videurs filtrent

A 19 h 30, la voix au micro annonce la fermeture des bassins. Commence alors un étrange ballet. Les hommes encravatés et les filles en escarpins croisent les baigneurs, savates aux pieds et serviette sous le bras. Les uns quittent leur lieu de villégiature, les autres viennent décompresser sur les canapés blancs des Voiles, un bar-lounge fraîchement ouvert au bord de l’eau. «Les habitués n’ont pas vu son ouverture d’un bon œil. Mais les Genevois attendaient un lieu comme celui-ci et cela fait partie des choix stratégiques», explique Christian Marchi, nouveau directeur de Genève-Plage. Son arrivée date d’à peine plus d’un an et les projets haut de gamme se succèdent. En septembre, c’est un gros chantier devisé à 25 millions qui débutera afin de doter l’établissement d’un spa et d’un hammam. Genève-Plage tournera alors durant toute l’année dès l’hiver 2014.

En attendant, la nouveauté est aux Voiles. Les videurs filtrent à l’entrée. Les grandes marques horlogères ou de champagne s’affichent en sponsor. Les traders et VIP adorent. Monique, elle, ne fréquente pas ce type de bar, mais elle l’avait bien dit: «Genève-Plage, c’est huppé.»

 


Inauguration en 1932

L’histoire de Genève-Plage s’inscrit dans la trajectoire du quai des Eaux-Vives, aménagé au début du XXe siècle. En 1916 naissent les Bains du soleil et du lac sous l’impulsion d’une poignée d’hommes à l’origine de l’association du même nom. En 1932, les bains publics, fruits d’un partenariat public-privé, sont déplacés au lieu-dit du Port-Noir et prennent le nom de Genève-Plage.

L’inauguration a lieu le 28 mai et, malgré la journée froide et pluvieuse, les curieux affluent pour le grand événement. S’ensuivent des années difficiles, entre la grande dépression et l’après-guerre. C’est en 1972 que Genève-Plage sortira la tête de l’eau, grâce notamment à la construction des bassins de natation. Aujourd’hui, l’association Genève-Plage, à but non lucratif, gère toujours l’établissement qui compte entre 150 000 et 220 000 entrées par saison.

A lire: Bernard Lescaze, Au bonheur de l’eau, Histoire de Genève-Plage, Editions Slatkine. 2007.

 

 

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Passionné par l’info au coin de la rue, j'ai commencé à écrire dans ma commune de Vernier.
En parallèle, un site Internet consacré au foot des talus, des études et expériences dans le journalisme local ainsi que de longs voyages à vélo ont tracé mon parcours.

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