Je n’ai pas pour habitude de parler de moi, j’ai plutôt évoqué la plupart du temps le travail d’une équipe lorsqu’il s’agissait des animations que nous organisions pour les patients ; même si cette dernière était très restreinte, puisque constituée juste de mon ancien collègue Manu, à mi-temps, et d’un groupe d’auxiliaires bénévoles pour nous appuyer tous les deux.
Lorsque j’ai décidé de partir en préretraite en été 2013, après 23 ans à la tête de l’Atelier d’Animation de Beau-Séjour, je pensais au début me retirer modestement « par la petite porte ». Je tenais cependant à organiser un « pot de départ » à la hauteur, pour honorer les collègues proches, les bénévoles et les intervenants extérieurs, qui m’avaient permis de mener à bien mes activités durant tant d’années. Mais bien malgré moi, la liste devenait de plus en plus longue, au fur et à mesure que j’inventoriais les personnes à inviter…
De plus, lorsque j’écrivis à Bernard Chevallier, sympathique tromboniste et chef de l’orchestre de jazz bien connu Le Vieux Carré, qui s’est produit durant plus de vingt ans devant notre public hospitalier, celui-ci me répondit : « je viens avec toute l’équipe et on t’offre deux heures de concert ! ». Le petit apéro intimiste que je prévoyais prit alors une autre tournure : je devais impérativement en faire bénéficier les collègues de Beau-Séjour, en organisant plutôt une fête qui profiterait également aux patients et à leurs visites, dans un prolongement des réjouissances durant l’après-midi.
Cette manifestation avait pour but de prendre congé de mon lieu d’activité professionnelle dans une ambiance festive, offrir encore à chacun une animation dans la même lignée que ce qu’on avait organisé durant plus de deux décennies ; dans cet esprit, j’avais la ferme intention de remercier toutes et tous, exprimer ma gratitude pour le soutien et l’accueil qu’ils avaient réservé aux prestations socioculturelles et de loisirs en faveur des personnes séjournant à Beau-Séjour.
Il est vrai que dans cet univers particulier, dédié en primeur aux soins, la plupart des collaborateurs se montraient toutefois convaincus de l’utilité de notre Atelier d’Animation et approuvaient nos valeurs. Le patient qui vient à l’hôpital se retrouve dans un lieu qu’il ne connait pas, dans un contexte de maladie et de souffrance. Afin de faire baisser l’angoisse et la peur liée à cette hospitalisation, il se rattache bien souvent à ses habitudes culturelles, renforçant ainsi ses repères identitaires. Le personnel soignant qui avait compris ce processus, dans un souci du mieux-être des usagers, se tournait rapidement vers notre service afin d’instaurer un partenariat privilégiant ainsi la démarche humaniste et sociale de l’animation. En effet, les infirmières étaient les mieux placées pour repérer les patient qui déprimaient ou s’isolaient, et pouvoir les guider ensuite vers les activités de loisirs afin de les resocialiser. C’est donc aussi pour saluer cette intelligente coopération, démontrer ma reconnaissance pour cette collaboration, que j’invitai toutes ces personnes à mon apéritif de départ.
Le jour de cette verrée très « améliorée », dès midi, la grande salle de cours du Pavillon Louis XVI accueillit des collègues de toutes professions, les bénévoles, des intervenants extérieurs et bien d’autres invités. Le Vieux Carré avait déjà entamé son récital de jazz New Orleans sous un pavillon de jardin monté dans le parc ; après les discours officiels, des témoignages chaleureux notamment de mon collègue Manu – et beaucoup d’émotion – la remise de nombreux cadeaux, en commun et individuels, une éblouissante réception s’offrit aux participants. Je soulignerai le magnifique travail réalisé par l’équipe des professionnels de la cuisine des HUG, avec laquelle nous avions toujours entretenu une collaboration fructueuse pour l’élaboration des repas spéciaux : Journée de l’Amitié, pique-niques, repas de Noël du Centre des Paraplégiques, notamment. Nous ne manquions pas non plus de les remercier à chaque fois, transmettre aussi les compliments des patients à la suite de ces « festins », envoyer nos vÅ“ux lors des fêtes de fin d’année. Ces marques d’attention permettaient d’entretenir de saines relations, partager des ressources, ce qui nous permettait de pouvoir compter les uns sur les autres pour toutes sortes d’organisations ou d’événements.
Ce jour-là , une brigade de sept cuisiniers et d’aides s’est affairée durant près de deux heures pour dresser un buffet qui a dépassé tout ce que j’avais pu imaginer ! Le travail en cuisine pour confectionner ces merveilles culinaires et gourmandes a également dû être conséquent, puisque tout a été fait « maison » pour l’occasion. Lors de l’installation de ces confections plus alléchantes les unes que les autres, je ne tarissais pas d’éloges et de compliments sincères envers le personnel du service restauration qui avait préparé tout cela. On me répondit : « vous le méritez largement, avec tout ce que vous avez fait pour les patients… » (A suivre)
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