
Pour les personnes qui lisent cette rubrique pour la première fois, peut-être par hasard, ou qui « prennent le train en marche » l’objectif de cette série d’articles est de démontrer que la suppression de l’animation à l’hôpital Beau-Séjour (en même temps que la fermeture du salon de coiffure de l’hôpital cantonal d’ailleurs), décision prise par la Direction des HUG en juillet 2014, a eu son lot de conséquences. Des projets institutionnels (par ailleurs abandonnés semble t-il aujourd’hui pour des raisons obscures…) et des mesures dites « d’économies » ont été à l’origine de cet épilogue.
En effet, il ne s’agissait pas simplement de l’abolition d’une banale salle « où les patients pouvaient jouer aux cartes à l’hôpital », mais bien de la disparition d’une véritable « institution » implantée depuis près de trois décennies, créée sous l’impulsion initiale des Aumôneries. L’étendue des tâches, le nombre des prestations, et la palette de toutes les activités mises en place par l’Atelier d’Animation est d’ailleurs présenté au fil des articles. Le préjudice majeur sur la collectivité, c’est que les personnes hospitalisées se sont vues privées du jour au lendemain d’un espace de ressourcement et de réconfort, grâce notamment aux activités socioculturelles proposées par l’équipe d’animateurs, de stagiaires sociaux et d’auxiliaires bénévoles.
Ces derniers volontaires se sont par ailleurs retrouvés désœuvrés, certains ayant totalisé plus de 25 ans d’accompagnement fidèle, d’écoute empathique auprès des patients et d’aide inconditionnelle aux animateurs professionnels (lire mon article N°10). Les écoles sociales, et en particulier la HETS de Genève, ont été touchées également en perdant la collaboration avec l’Atelier d’Animation, notamment lors du processus d’accompagnement et de suivi des étudiants en formation : celles-ci ont en effet placé en plus de vingt ans une trentaine de stagiaires, sur la cinquantaine accueillie sur ce lieu de pratique très prisé pour la diversité de ses enseignements (art. N°11).
Les contacts ont été rompus aussi brusquement, bien malgré eux, avec tous les organismes d’aide et de soutien extérieur, donateurs ou autres sponsors, qui ont offert leur collaboration, appuyé ou facilité nos démarches, financé généreusement certains de nos projets ou cautionné de grandes réalisations. Nombre de ces mécènes ont été sensibles dès le début aux valeurs de l’animation, se sont sentis concernés par nos initiatives en adhérant fidèlement à notre action en faveur des usagers/patients de Beau-Séjour.
La contribution fructueuse des associations, orchestres, musiciens, artistes et autres intervenants d’horizons divers, acteurs principaux pour l’organisation des concerts, spectacles, prestations artistiques et culturelles offertes aux patients, a aussi cessé de façon abrupte. Le Conservatoire de Musique ou le Service Culturel de la Ville de Genève, entre autres, avaient également été des partenaires privilégiés, en particulier lors de récitals classiques et à la Fête de la Musique dans les jardins de Beau-Séjour.
Tous les lieux, entreprises, communautés, refuges, auberges, ou des particuliers qui nous ont aimablement accueillis lors des sorties excursions avec nos pensionnaires, mis à disposition leurs installations ou leurs locaux, se sont vus également remerciés, alors qu’on les informait de la suspension de ces visites, conséquente à la disparition de l’Atelier d’Animation.
Toutes ces synergies extérieures se sont parfois élaborées lorsqu’un membre d’une famille, un ami, une connaissance d’un tiers ou un employé d’une société, s’est trouvé confronté à la réalité d’une hospitalisation à Beau-Séjour, suite à une maladie ou un accident. La participation à une prestation musicale, la visibilité d’une activité artistique ouverte à tous, a permis la découverte du rôle de l’animation qui leur est ainsi apparu comme une évidence. La présence d’un secteur culturel ou de loisirs dans l’environnement hospitalier se révélant bénéfique à l’amélioration du moral et à la guérison du patient, a donc éveillé l’envie chez certains d’y apporter une contribution concrète.
Cette chronique, en plus d’être un témoin manifeste de tout ce qui avait été mis en place pour offrir un mieux-être aux personnes hospitalisées, a aussi pour objet de rendre hommage à tous les acteurs qui ont écrit l’histoire de l’Atelier, collaboré à l’organisation d’une action socioculturelle crédible et performante dans l’institution. Tous ces partenaires ont œuvré, chacun à leur manière, pour accorder aux usagers des moments de gaieté et de répit, entre les séances de thérapie et les traitements : cela a permis d’insuffler à nombre d’entre eux une énergie positive, un petit « supplément d’âme » donnant la volonté et la force d’appréhender les défis journaliers.
Témoignages
« Les animations permettaient également les échanges entre patients et cela renforçait encore certaines amitiés naissantes de colocation. C’est très bien de tenir une rubrique dans Signé Genève. Intéressant ! C’est sûr que pour d’anciens patients ayant connu la chaleur des contacts, la déco et le divertissement franchement amical, cela doit faire un drôle de vide maintenant ! » Patricia Queloz, bénévole.
« Je vous félicite pour le magnifique travail que vous avez effectué durant tant d’années et qui a aidé des patients souvent lourdement frappés par la maladie de voir leur sort égayé par les nombreuses activités variées que vous leur avez proposées. Je trouve très triste voire inhumain, que ce service soit supprimé et je partage vos remarques à ce sujet. Avec mes cordiaux messages. » Me Claude Ulmann