Giovanni, Carlo et les autres: des retraités à l’université

Chaque fin d’après-midi, un groupe de retraités vient s’installer aux tables à l’entrée d’Uni Mail pour parler et jouer aux cartes. Ils sont partie intégrante du paysage universitaire mais peu nombreux savent qui ils sont. Explications en détails (et en rires) avec cinq d’entre eux.

Louis Jolivet est le premier sur les lieux, un peu avant 15h. Les autres suivent. Ils s’installent à une table et discutent. En fonction des présences, ils débutent une partie de cartes. Ce rituel a lieu chaque année, lorsque la température commence à descendre ou simplement lorsqu’il fait mauvais temps. Depuis combien de temps se retrouvent-ils là-bas ? Personne ne peut vraiment le dire. Au départ, ils se rendaient à la maison de quartier de la Jonction où des activités y étaient organisées pour les retraités. Lorsque celles-ci ont cessé, il a fallu trouver un autre endroit. Le bâtiment d’Uni Mail a l’avantage d’être au centre de ville. Il y fait chaud et des tables sont à disposition. L’administration universitaire a donné son accord. Carlo Costanzo corrige. Ils sont venus quelques fois et personne n’a rien dit. Alors l’endroit a été adopté. Et grâce au bouche-à-oreille, ils ont fini par s’y regrouper.

« Il descend tous les bons dieux du monde »

Les présences des uns et des autres ne sont pas régulières. Ivo Belintende peut venir tous les jours pendant trois semaines et ne plus revenir pendant plusieurs mois. Ils sont là pour passer du temps ensemble, discuter et pour certains, jouer aux cartes. Les tablées se font en fonction du style de cartes. Dans le cas de ce petit groupe, ce sont les napolitaines qui sont utilisées : l’épée, le bâton, l’or et la coupe remplacent nos traditionnels pique, trèfle, carreau et cœur. Le jeu comporte 40 éléments (contre 36 pour nous). Les partenaires ne sont pas fixes, les groupes se forment spontanément. A part Giovanni Cristallo, très mauvais perdant, qui ne joue qu’avec une personne en particulier. Comme il s’énerve très facilement, Michele Filannino (qui ne joue pas) reste derrière pour jouer les médiateurs. Lorsque le jeu lui est favorable, Giovanni Cristallo développe un tic sur le visage. En revanche, si la situation s’inverse « il descend tous les bons dieux du monde ». Chose qui fait beaucoup rire ses collègues, surtout qu’il n’y a aucun enjeu et que chacun joue pour son compte. Les parties se font à quatre ou à six de façon à intégrer tout le monde.

Une véritable famille

Ils considèrent le groupe comme une deuxième famille. La grande majorité est d’origine italienne ou espagnole. Ils sont là pour échanger, discuter de la santé, du pays. Ils déplorent qu’il n’y ait pas d’endroit à Genève pour les retraités. En même temps, « c’est l’occasion de voir quelques filles. Mais non, la jeunesse en général ». Ils discutent dans leur langue maternelle mais font attention si dans le groupe quelqu’un ne parle pas l’idiome. Les plus mordus restent jusqu’à 19 ou 20h, les autres s’en vont vers 18h. C’est le cas de Carlo Costanzo qui a pour tâche de chercher ses petits fils à l’école et les ramener à la maison.

Et les femmes dans tout ça ? La question paraît absurde. « Les Italiens, ils laissent les femmes à la maison, tu savais pas ? Il y a des femmes qui jouent l’été à Plainpalais mais elles ne viennent pas ici ».

 

En partenariat avec le Medialab de l’Université de Genève