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La gastronomie déboule dans la rue

La gastronomie déboule dans la rue

La tendance des restaurateurs ambulants et raffinés débarque à Genève. Mais obtenir un emplacement sur le domaine public s’avère une mission quasi impossible.

Un parking des Acacias. Avec leurs costards bien taillés, les cadres de deux grandes banques de la place font la queue devant une roulotte transformée en cuisine. Ils mangeront sur ces quelques tables et bancs pliables qui composent la terrasse. Au menu: hamburger-frites.

Les critiques gastronomiques ont testé ce menu à la réputation triviale: les commentaires sont dithyrambiques. Ce qui explique peut-être pourquoi The Hamburger Foundation sert quotidiennement une centaine de menus depuis sa création durant l’été 2012. L’emplacement change chaque jour, mais la clientèle est fidélisée grâce à des rendez-vous hebdomadaires immuables. Une stratégie pour l’heure efficace qui s’appuie également sur le pouvoir des réseaux sociaux.

Alors, comme eux, ils sont de plus en plus nombreux à se lancer dans la restauration ambulante haut de gamme. Luca Martino en fait partie. Avec son triporteur et ses percolateurs encore luisants, Caffettino dorlote le petit noir. «Un espresso doit sortir en 25 secondes de la machine, sinon ce n’est pas un espresso», affirme l’expert, dont le breuvage principal ne dépasse pas les deux doigts au fond de la tasse. Une conception quasi mystique du café par ailleurs primée par l’association Genilem, qui soutient la création d’entreprises innovantes.

Mobilité et produits raffinés

Le départ en fanfare de ces cafetiers et restaurateurs ambulants peut être résumé à deux facteurs qui collent bien à l’époque: la mobilité et la recherche de produits raffinés. «Le loyer que tu ne paies pas te permet d’investir dans la qualité de la nourriture», résume George Bowring, l’un des trois jeunes entrepreneurs à l’origine de The Hamburger Foundation.

Reste la question centrale pour ces restaurateurs d’un nouveau type: l’emplacement. Selon George Bowring, «c’est un facteur de succès essentiel, je dirais qu’il y contribue à hauteur de 60%». En revanche, les uns et les autres l’affirment, impossible d’obtenir une autorisation pour exercer son métier sur le domaine public, à l’exception des marchés.

Poulets logés à la même enseigne

Dès lors, les fondateurs de la roulotte à hamburgers se sont vus contraints de négocier notamment avec des banques des Acacias ou une quincaillerie aux Eaux-Vives pour disposer d’un espace. «Heureusement que nous avions quelques contacts. Mais en tant qu’entrepreneur, c’est frustrant. On pourrait en faire davantage, pour nous mais aussi pour l’emploi», lâche Marc Gouzer, l’un des fondateurs de ce «food truck» – la tendance vient des Etats-Unis – qui emploie cinq personnes et une dizaine d’extras. Luca Martino se limite à des événements ponctuels pour chauffer ses cafetières. «J’ai vite abandonné l’idée de pouvoir vendre dans la rue», dit-il.

Enfin, les rôtisseurs de poulet, dont le parfum envahit les quartiers depuis plusieurs années, font face à la même galère lorsqu’il s’agit de trouver un emplacement. «C’est seulement grâce à des partenariats avec La Poste, les CFF, la Coop et quelques stations-services que nous pouvons nous installer dans les quartiers», éclaire Christian Meier, directeur de Max Poulet.

Son entreprise emploie six rôtisseurs qui se partagent le territoire genevois. L’an dernier, 100 000 poulets ont été vendus dans le canton, exclusivement sur des terrains privés. «Il suffit qu’un bout de pare-chocs empiète sur le domaine public pour subir les remontrances des agents municipaux, regrette-t-il. Alors on a arrêté de négocier avec la Ville pour obtenir des emplacements. On s’est trop ennuyés.»

 


Pourquoi la Ville refuse systématiquement

Chaque mois, environ quinze demandes sont déposées au Service de la sécurité et de l’espace publics de la Ville de Genève. Antonio Pizzoferrato, son chef, confirme le refus systématique de toute requête visant l’utilisation du domaine public à des fins commerciales. «Cette pratique est nécessaire compte tenu du nombre important de demandes. Si le service accepte d’entrer en matière pour l’une d’elles, il devrait alors le faire systématiquement, conformément au principe d’égalité. Le territoire municipal deviendrait alors un marché à ciel ouvert.»

Suite aux refus, certains demandeurs ont saisi le Tribunal administratif, mais toutes les procédures entreprises se sont soldées par un rejet du recours.

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Passionné par l’info au coin de la rue, j'ai commencé à écrire dans ma commune de Vernier.
En parallèle, un site Internet consacré au foot des talus, des études et expériences dans le journalisme local ainsi que de longs voyages à vélo ont tracé mon parcours.

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