Visite guidée de Genève pendant et après le confinement
Genève repart. Dans son rythme et avec ses rebondissements, la vie reprend dans la cité de Calvin. Alors que les institutions sont toujours plus nombreuses à rouvrir leurs portes, les lieux emblématiques retrouvent leurs engouements habituels. Pour marquer cette période particulière et ineffaçable de notre mémoire, la photographe genevoise Karine Bauzin a publié aux Éditions GOOD HEIDI Production un album-souvenir. Au total, 100 clichés en noir et blanc illustrent l’époque pesante et angoissante du semi-confinement. À leur à côté, 100 autres photographies présentent les mêmes lieux genevois depuis le même angle, mais cette fois-ci après la libération. La vie a repris en couleurs !
Durant ce printemps 2020, les capitales du monde ont annoncé consécutivement le confinement. Alors que le COVID-19 est en pleine progression, les clichés des rues désertes et les places abandonnées de New York, Londres ou Paris circulent sur Internet, rendant la situation encore plus morose. « Au départ, mon idée, en tant que photographe de presse, était de documenter cette période qui nous a profondément touchée, marquer ce moment unique que nous vivions pour présenter une Genève en noir et blanc. Comme dans un vieux film. Allant plus loin dans ma réflexion, j’ai décidé de revenir sur ces mêmes lieux une fois que nous serions déconfinés. À ce moment, je ne connaissais même encore la date, mais je voulais déjà montrer la vie, la vie en couleurs » explique Karine Bauzin.
Aventure en noir et blanc
Ainsi, armée de son Leica avec un objectif grand angle, la photographe a parcouru les différents quartiers genevois une première fois. Les lieux de passage et de rencontre, comme les gares et l’aéroport étaient les points incontournables de son parcours, au même titre que les postes-frontières et les rues les plus animées de la ville. Les clichés étaient réalisés à des moments différents de la journée, pour illustrer aussi bien le fourmillement à la lumière du jour que l’atmosphère animée de la vie nocturne. « Certains de ces lieux sont déserts le dimanche matin, par exemple, mais au mois de mars, ce n’était pas la même ambiance, pas le même vide. C’est à la fois impressionnant et époustouflant de les découvrir complètement abandonnés. Il y avait alors un véritable sentiment de peur de sortir, je ressentais cette angoisse dans l’air et à cet instant, je n’aurais jamais imaginé que ce sera la seconde série qui serait la plus difficile à réaliser ! » se rappelle Karine Bauzin.
Retour à la couleur
Après ces interminables semaines de pause, l’annonce du déconfinement a servi de bouton « play » de retour à la vie. À partir du 11 mai 2020, Genève a commencé à retrouver progressivement ses passions d’antan et accueillir les habitants dans leurs endroits de prédilection. La photographe a donc refait le tour des mêmes lieux plusieurs fois pour composer la seconde partie du livre, tout en discutant avec les déconfinés pour retrouver le côté humain de la photographie. De ces échanges sont nés certains clichés, comme notamment ce couple de danseurs de tango devant l’Usine, avec qui la photographe avait échangé dans un café quelques minutes auparavant. « Je voulais montrer le retour à la vie en couleurs, mais la ville n’avait pas encore retrouvé sa frénésie habituelle, les terrasses étaient pratiquement vides, les passants rares et les places de parking inutilisées. C’était ma principale difficulté. Pour l’anecdote, au mois de mars j’avais photographié les guichets d’enregistrement de Swiss, me rappelant de la quantité de voyageurs qui y attendent habituellement. Quand j’y suis revenue trois mois plus tard, les vols de la compagnie helvétique n’avaient pas encore repris et le lieu était tout aussi dessert ! » sourit la photographe.
Côté organisation, il était nécessaire de retrouver le même angle pour capturer la même scène. C’est donc avec les clichés en noir et blanc sur son téléphone et le même appareil photo, que la photographe faisait des tests pour retrouver les cadrages et compositions. Les trois mois d’intervalle et le changement de saison ont également contribué à ces photos, leur apportant une touche unique. Les arbres se sont parés de leur feuillage, l’herbe a retrouvé ses couleurs estivales et quelques nouveaux aménagements urbains sont visibles à la comparaison. Vifs et animés, ces clichés montrent une Genève habituelle où seul le ciel orageux témoigne d’un retour à la vie encore incertain.
« L’ouvrage n’a pas de 4ème de couverture, mais deux couvertures. L’une est en noir et blanc avec inscrit Post Tenebras Lux et l’autre en couleur avec la mention de Post Lux Tenebras. Ainsi, le livre se tourne à l’infini, pour accentuer le fait que la situation est encore conditionnelle, que le vaccin n’a pas encore été trouvé et que le nombre de cas réaugmente en Suisse. Notre avenir est encore imprécis, mais la vie est là , nous sommes là . C’est justement cet espoir que j’ai envie de transmettre ! » conclut Karine Bauzin
