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L’éternel printemps de l’Age d’Or

L’éternel printemps de l’Age d’Or

Qui ne connaît pas – selon le slogan créé pour son cinquantième anniversaire – « la plus petite pizza et fière de l’être » ? Véritable institution et l’une des dernières authentiques enseignes de la cité, « l’Age d’Or » recèle, dans ses tentures rouges-néobaroques, bien des confidences depuis 1961… Retour en anecdotes sur la fabuleuse histoire de la première pizzeria genevoise en compagnie de l’actuel gérant, Thomas Affolter et de son associé Jean-Marc Brachard – ce dernier, sentimentalement lié au destin du restaurant depuis fort longtemps.

« C’est l’histoire de deux copains – commence Jean-Marc Brachard – celle d’Antoine Niklès dit Tony, fabriquant de montres à Genève et d’Henry Perey – surnommé Dady (avec un seul d!), architecte d’intérieur, décorateur et antiquaire, tous deux associés en affaires dans les années 50.
Pour se diversifier, ces deux compères, dynamiques et plein d’idées, créent d’abord un restaurant nommé « l’Impérial » à côté de « l’hôtel des Bergues » rue Philibert Berthelier, au premier étage de très beaux immeubles hélas aujourd’hui disparus. Ce restaurant a été un fiasco financier épouvantable car non seulement il était extrêmement luxueux mais en plus les deux patrons faisaient venir des orchestres très coûteux depuis Paris ainsi que des chanteurs comme Aznavour ou Bécaud, et même un gamin nommé Johnny Halliday, tous peu connus à l’époque ! »
Les cafetiers-restaurateurs de Lausanne – à l’avant-garde semble-t-il – leur parlent alors de la nouvelle tendance du moment : celle de danser sur des disques 45 tours… Nullement découragés après la fermeture de leur restaurant, ils décident de lancer ce qui sera la première discothèque de Genève à savoir « le Bar à whisky » située dans un premier temps à la même adresse que « l’Impérial » et qui déménagera très vite à la rue du Prince en devenant « Le New Bar à whisky » mais que tous les anciens clients continueront à appeler « le Bar à whisky ». « Ce dancing deviendra la boîte de nuit la plus successful des années après-guerre, poursuit Jean-Marc Brachard. L’intérieur ressemblait à ce décor de « l’Age d’Or », comme « l’Impérial » d’ailleurs, avec ces objets style Napoléon III que Dady et Tony affectionnaient beaucoup et que l’antiquaire possédait en nombre dans son magasin à la Grand-Rue. Dans le premier restaurant, il y avait même un portrait en pied de Napoléon III et de l’Impératrice Eugénie peints par Winterhalter, une véritable pièce de musée ! ».
Créatifs, passionnés par l’Italie et férus de déco, les deux amis constatent qu’il n’y a pas de pizzeria à Genève :  » il fallait que cela soit un restaurant à plat unique avec un service rapide, continue Thomas Affolter. Et les pizzas – lovées dans des moules bien pratiques – ont pris la taille du four du tout premier petit bistrot de « l’Age d’Or », situé en haut de la Rue Rousseau en 1955 avant de déménager en 1961 dans le bâtiment réalisé par Marc-Joseph Saugey et qui a gardé du coup le même format du four à bois. Le succès est immédiat car les mets sont bon marché et le cadre somptueux :  Les Genevois venaient en effet déguster « le gâteau à la tomate » pour CHF 2.- au milieu d’un fastueux décor de théâtre, avec ses petits balcons à l’italienne, des statues de maures datant de la fin du 18ème siècle, des bras de grooms en applique tenant des lampes et des miroirs authentiques. Dans la foulée, ils inaugurent un autre lieu bien connu des Genevois : « la Toison d’Or ».
« Il faut savoir qu’Henry Perey était le décorateur en vogue à Genève dans les années soixante ajoute Jea-Marc Brachard qui l’a bien connu. Il a notamment réalisé la façade (classée) et l’agencement de l’Hôtel « Richemond » ainsi que l’intérieur de la « papeterie Brachard ». D’ailleurs, pour l’anecdote, Dady a eu l’occasion de rencontrer J. Paul Getty, l’homme le plus riche du monde de l’époque qui résidait au « Richemond » et venait dîner tous les soirs à « l’Impérial ». Getty, propriétaire de l’hôtel « Pierre » à New-York lui a demandé de venir le décorer car il adorait ce que Perey faisait. Ah non désolé a répondu Dady, je ne peux pas quitter ma mère ! ». Carrière internationale ratée par amour filial ? On ne le saura jamais !

Recette de pâte secrète et inchangée
N’étant pas restaurateurs, Tony et Dady confient la gestion de « l’Age d’Or » à la sœur de Tony et à son amant…qui ne l’étaient pas non plus…
« Lorsque j’ai demandé à Thomas Affolter – qui connaissait bien Dady également – de reprendre la gérance du restaurant en 1995, personne ne pouvait imaginer que « l’Age d’Or » était dans les chiffres rouges et en très mauvaise posture reprend Jean-Marc Brachard, car l’établissement était géré par des non-professionnels qui accumulaient les factures et confondaient malheureusement la caisse avec leurs salaires ! Mais je dois avouer, malgré tout, que le maître d’hôtel était un sacré personnage dont doivent se souvenir certains clients : toujours en costume-cravate, fleur à la boutonnière, il recevait personnellement les clients comme au « Ritz » ! De plus, certaines serveuses ont également marqué ce lieu, quelques-unes sont restées près de quarante ans ! ». A l’instar du chef-cuisinier qui ne nous livrera pas la recette de cette pâte si légère et croustillante, fabriquée maison chaque jour et qui se transmet de pizzaiolo en pizzaiolo.  » Même moi je ne la connais pas!  » s’exclame le sympathique gérant au parcours prestigieux. Après avoir été cuisinier au « Landgasthof Bären » de Madiswil dans le canton de Berne, ce passionné décide de suivre l’école hôtelière de Lausanne tout en faisant ses armes à « l’Hôtel des Bergues » et à « la Coupole » avant de passer une dizaine d’années à « l’Intercontinental ». « Ce fut un vrai challenge de reprendre la tête de ce lieu mythique qu’est « l’Age d’Or », même mon banquier m’enviait ! Il a fallu bien sûr redresser la barre au niveau des finances puis procéder à quelques restructurations : remplacement des assiettes ébréchées par des assiettes « Langenthal », création du logo, nouveaux sets de table, rénovation de la cuisine… » La carte est restée la même en revanche (on y sert toujours la crème au chocolat Stalden, des pâtes fraîches ou des schüblig grillés par exemple !) sauf pour une dernière arrivée, la « Nouvelle » : « On m’a souvent dit qu’une pizza n’était parfois pas suffisante (170gr) pour de gros mangeurs mais deux c’était trop ! Donc j’ai imaginé un diamètre et un poids médians : 250 gr pour quelques francs de plus ! Et puis je voulais garder la même dimension des assiettes par gain de place et pour respecter l’origine ».
Dernier changement et de taille cette fois : le côté bar, qui, fréquenté à l’époque par quelques bons buveurs, menaçait l’établissement de devenir deux endroits distincts. C’est alors que le dernier rêve de Dady se réalise : remplacer ce bar par un authentique wagon du BAM (Bière-Apples-Morges) ! « Il a été démonté et reconstitué sur place, s’amuse Thomas Affolter. A l’origine, c’était le coin non-fumeur, plutôt destiné aux enfants d’ailleurs, mais une clientèle plus âgée apprécie également se mettre ici. » Est-ce que le quartier a changé? « Suite à la fermeture de tous les cinémas alentours, il est vrai que la clientèle tardive du soir est moins nombreuse regrette le gérant, mais nous avons nos habitués qui retrouvent leurs souvenirs grâce au goût inimitable de cette pizza, les petits enfants des premiers clients des années soixante qui perpétuent la tradition et puis, comme il faut évoluer avec son temps, nous livrons maintenant à domicile ! » Mais sans ce décor unique et précieux, bien évidemment, heureusement en demande de classement.

L’Age d’Or, 11 rue de Cornavin
Du lundi au samedi de 9h15 à 23h45 – 022 731 30 93
A domicile via UberEats.com ou Eat.ch

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Photo du profil de Nathaly De Morawitz-Schorpp
Grâce à Signé Genève, Nathaly a le privilège de pouvoir partager ses multiples passions: chemin de fer, histoire genevoise, rencontres avec les gens de son quartier et échanges avec des artistes sont ses thèmes favoris. Guide culturelle à ses heures, elle aime particulièrement faire découvrir les multiples facettes de Genève sous un angle original et insolite (www.geneve-en-balade.ch). Quand elle n'est pas à Carouge, sa ville de coeur dont elle connaît tous les recoins, Nathaly participe à l'organisation de voyages culturels et gourmands en Italie au sein de l'association INSOLitalia.





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3 commentaires

  1. Répondre
  2. Merci Nathaly pour ce voyage historique dans ce lieu si mythique pour tout genevois de souche ou d’adoption…
    Toujours un plaisir et un régal d’y retourner, une fidèle de l’endroit.
    Nanou

    Répondre
    • L’éternel Printemps de l’Age d’or

      Répondre

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