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Les défis de l’association de danse contemporaine des Eaux-Vives

Les défis de l’association de danse contemporaine des Eaux-Vives

Le directeur de l’ «association de danse contemporaine» évoque la danse contemporaine comme un véritable art vivant, éclectique et ouvert sur le monde, loin de tout conformisme à un genre donné mais se voulant surtout accessible au plus grand nombre. Rencontre autour d’un café dans le quartier des Eaux-Vives.

Rendez-vous est pris avec Claude Ratzé, le directeur de l’ « association de danse contemporaine », un mercredi en fin de matinée, dans un café de la rue des Eaux-Vives. Enthousiaste et prolixe au sujet de l’association  dont il tient les rênes depuis 1992 – après avoir exercé les métiers de cuisiner et d’animateur socio-culturel -, Claude Ratzé me retrace dans les grandes lignes l’historique de l’ « adc » : née au milieu des années quatre-vingt dans le quartier de Champel, elle a ensuite vécue en véritable nomade, « squattant » différents théâtres au gré des occasions et des rencontres. En 2004, l’ « adc » s’est installée à la salle communale des Eaux-Vives – «de manière temporaire», dixit M. Ratzé – mais s’y est visiblement plu car elle y tient toujours ses quartiers.

Une véritable transformation scénographique a dû s’opérer afin de rendre l’espace apte à accueillir des spectacles de danse contemporaine. Les spectateurs se retrouvent ainsi assis au sein même du théâtre, tandis que les danseurs évoluent dans l’espace dit publique. Désormais, la salle reçoit du monde trois cent quarante jours par an selon les estimations du directeur, ce qui n’est pas pour lui déplaire. Mais que peut-on bien voir dans cette salle alors ? « Il y a tant des créations d’artistes genevois que celles de chorégraphes invités (…) et nous pouvons proposer quinze spectacles par saison (…) » poursuit Claude Ratzé.

Par ailleurs, il est intéressant de savoir que l’ « adc » jouit de la gestion de trois studios de danse au Grütli, studios dans lesquels les artistes peuvent s’entraîner et se préparer comme il se doit, en vue des représentations à venir. Financée par la Ville et l’Etat de Genève, en plus de recettes publiques, l’ « adc » peut se targuer d’occuper deux fois par an le Bâtiment des Forces Motrices – point fort de sa programmation annuelle – avec des spectacles, des films se voulant pédagogiques et des conférences autour d’un artiste en particulier. Cette année, il s’agit de Trisha Brown, danseuse et chorégraphe

américaine, figure incontournable du courant de la danse post-moderne, ayant collaboré avec de nombreux plasticiens et autres musiciens. Et le BFM – sur son site – annonce que tout est complet, jusqu’à nouvel ordre, ce qui n’est pas pour déplaire à Monsieur Ratzé.

Un art vivant accessible à tous

Pour celles et ceux qui traînent derrière eux une curiosité inassouvie au sujet de la danse contemporaine – qui ne doit pas être confondue avec le tango ou encore le hip-hop précise la directeur -, les bureaux de l’ « adc » possèdent un centre de documentation regroupant plusieurs dizaines d’ouvrages touchant à divers aspects de la danse contemporaine mais également quelques vidéos.

Souhaitant proposer une véritable ouverture sur le monde de la danse, pour ne pas être taxés d’élitistes, Claude Ratzé et ses collaborateurs ont également mis sur pied des médiations en marge des représentations, pour accompagner les spectateurs qui en ont le désir, dans la découverte de cet univers qui peut paraître au début quelque peu abscons pour les non-initiés. Ainsi, cela va des échanges informels entre les artistes et les spectateurs à la sortie d’un spectacle à un authentique atelier cuisine en lien avec la thématique qui sera développée dans la pièce de

danse en passant par des sorties à l’étranger (France), en bus avec repas inclus, pour aller admirer des créations qui ne se déplaceraient pas à Genève. « J’aime rendre le théâtre vivant et chaleureux » souligne le directeur avec conviction. Il précise son propos, mentionnant que s’il est vrai que la danse n’est pas forcément d’un accès « facile », elle ne se veut pas renfermée sur elle-même, mais elle exige du public «une certaine curiosité et une ouverture d’esprit ainsi qu’un intérêt pour la diversité».

Le but de Claude Ratzé est de démythifier ce domaine artistique pour se défaire des « accusations » d’élitisme qu’il a trop souvent entendues dans la bouche de certains. « Ces ateliers sont faits pour donner des outils aux gens, pour leur permettre de comprendre ce qu’ils ont vu, pour répondre à leurs interrogations mais ce qui est aussi très important c’est le fait de partager, d’être ensemble ». On l’aura compris, le monde de la danse contemporaine demande un certain engagement de la part du spectateur – « c’est un public plutôt mélangé même s’il y a plus de femmes dans les rangs » – qui ne doit pas venir avec un esprit mâtiné de consumérisme esthétique et avide de divertissements faciles et prémâchés.

L’ « adc » se rêve comme un lieu au cœur de la cité, capable de susciter des réflexions tirées d’expériences faisant appel à nos divers sens, mais mettant en son centre la corporéité et ses dérivés comme base à une pensée plus élaborée et complexifiée, plus riche aussi. De plus, il est important de le rajouter, l’ «adc» publie un journal qui a comme but principal de développer un discours sur la danse contemporaine et de fournir des  « clés » d’approche, qui ne sont pas exclusives, pour s’initier en douceur, on l’espère, à ce continent qui mérite que l’on s’y arrête véritablement pour y prendre la température et, qui sait, peut-être y rester, médusé par ce mélange de fragilités et de forces dégagé par la création artistique de notre temps.

Un happening de l' »adc » (archives)

Jeux et entre – jeux : les formes hybrides de la danse contemporaine

Maintenant que vous savez dans quel état d’esprit vous pouvez accoster sur la rive de ce monde, il me reste à évoquer ce qu’est la danse contemporaine, de manière plus descriptive si tant est qu’il est possible de le faire, ce qui n’est pas moins sûr.

Ce qui domine actuellement dans ce domaine est ce que l’on appelle communément la danse conceptuelle et la danse formelle. En ce qui concerne la première, le chorégraphe va élire un concept de choix et mettre ses danseurs «au service» de ce concept. Obscur me dites-vous ? Il est vrai que le travail relève presque d’une philosophie, mêlant habilement les arts plastiques dans leur forme la plus épurée, et le rapport des sujets aux objets – matériels et immatériels – dans un corps à corps qui se redéfinit dans une permanence qui peut paraître infinie. Claude Ratzé aura la gentillesse d’éclairer ma lanterne, face à mon regard ébahi: «Si l’on s’occupe par exemple de mouvements contraires et que l’on prend l’entre-mouvement, les danseurs peuvent travailler sur la relâche du mouvement – sorte de virgule – et donc composer un mouvement continu à partir du mouvement relâché».

Quant à la danse formelle, les divers mouvements se retrouvent au service de la construction d’une « phrase » rythmique et scénique. Le directeur évoque encore des formes plus hybrides, mélangeant les préoccupations quotidiennes – mais non moins essentielles – du chorégraphe avec diverses « constructions » et élaborations autour de formes encore informes, de rythmes et d’idées qui émergent au fil du temps. Afin d’appréhender au plus près de son ressenti ce que ces propos théoriques tentent de rendre compte, rien ne vaut d’assister à l’un des spectacles, dont les tarifs restent avantageux à qui veut pénétrer dans cet univers.

Rien ne vaut l’incarnation humaine pour illustrer des aspects de la pensée que l’on pense réservés à des initiés. «C’est un domaine très vaste dans lequel il y a vraiment une certaine richesse», conclut Claude Ratzé. A voir donc, mais avant tout à vivre parce que rien ne remplace l’affectif pour entrer en lien avec la matière…

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Photo du profil de Emilie Snakkers
Parallèlement à des études en anthropologie clinique, j'ai toujours apprécié écrire et décrire mes expériences à l'aide des mots. Lectrice assidue d'un peu près tout ce qui me tombe sous la main, j'aime aussi rencontrer les gens et apprendre à travers ce qu'ils me racontent de leur vie. Actuellement psychologue à l'hôpital, je prends le temps de voyager et de me faire une culture cinématographique éclectique!

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