Sur Instagram, Souleymane Bâ dévoile un autre visage de Genève

Peut-être avez-vous déjà croisé Souleymane Bâ lors d’une promenade au centre de Genève. Avec son appareil photo, il immortalise des instants de vie quotidienne et les publie sur son compte Instagram (@tchoupomoting). Rencontre avec un genevois qui propose un regard différent sur sa ville.

L’histoire de Souleymane Bâ ferait rêver plus d’un photographe amateur. S’il s’est familiarisé aux bases de la photographie lors d’un cours au Cycle d’Orientation, il n’a pas suivi de formation spécifique. « Comme tout le monde, j’ai surtout pris des photos de famille. C’est seulement cette année que j’ai commencé à photographier des situations intéressantes ou inattendues avec mon smartphone », raconte-t-il. En juillet dernier, il décide de poster ses clichés sur le réseau social Instagram. Trois mois plus tard, sa page compte plus de 3’700 abonnés.

« Faire connaître Genève différemment »
Tous les jours à la pause de midi, Souleymane Bâ sort capturer des tranches de vie genevoises, muni de son appareil photo. Ses clichés d’inconnus pris sur le vif appartiennent à un genre à part : la photographie de rue. Un art où le photographe doit « trouver l’angle qui rendra extraordinaire une scène banale » définit Souleymane Bâ. Une façon de montrer sa ville sous un jour nouveau. « J’ai grandi à Genève et j’ai souvent entendu dire que c’était une ville ennuyeuse, explique-t-il, mais en étudiant le travail d’autres photographes, j’ai remarqué que ceux qui habitent de petites villes font quand même des photos extraordinaires ». Pas besoin de vivre à New York, il suffit d’être sensible à la beauté du quotidien. Souleymane Bâ dément d’ailleurs un préjugé qui colle aux habitants de la cité de Calvin : « les Genevois paraissent froids, mais si l’on fait un pas vers eux, ils sont très chaleureux », raconte-t-il. L’occasion pour le photographe de faire de belles rencontres : « une fois, une dame que je prenais en photo m’a remarqué, se souvient-il, on a passé près de 30 minutes à discuter de photographie. D’autres gens m’ont écrit de l’étranger pour me dire J’ai vu tes photos, j’ai envie de venir à Genève en vacances ! ».

L’importance des lectures
Toutefois, le talent ne suffit pas. Pour développer son propre style, le Genevois s’est inspiré d’autres photographes de rue. L’étude des clichés du photographe français Henri Cartier-Bresson l’a particulièrement inspiré : « l’ouvrage qui m’a le plus marqué, c’est un livre de poche avec ses photos les plus célèbres, sans commentaires ni explications, juste une petite introduction le présentant », se souvient-il. C’est d’ailleurs en raison de cet héritage que le photographe genevois privilégie le noir et blanc dans ses travaux. « Les clichés des grands maîtres de la photographie de rue sont en noir et blanc, explique-t-il, parfois une photo est belle seulement par sa couleur. Avec le noir et blanc, il faut se concentrer sur l’action et donner une signification à la photo ».

Le facteur humain avant la technique
Outre son Instagram, Souleymane Bâ tient un blog où il partage son expérience de photographe de rue. « Je ne parle pas de technique comme le font la plupart des blogs, pour moi, le plus important c’est l’aspect humain, explique-t-il, même avec un smartphone, on peut obtenir une photo avec de la chaleur et de l’humanité, pas besoin qu’elle soit parfaitement cadrée ». Son blog donne des conseils pratiques aux lecteurs, depuis l’importance de porter des souliers confortables à la nécessité d’être dans un état d’esprit positif. « Quand on sort prendre des photos, il faut avoir envie de rencontrer les gens », conseille Souleymane Bâ. Une autre qualité indispensable au photographe de rue est la persévérance : « il faut prendre beaucoup de photos. La plupart ne sont pas exceptionnelles, il y en a une bonne tous les deux ou trois jours » confie-t-il. Mais la bonne photo n’est pas aussi inaccessible qu’on l’imagine : « quand je me documentais sur les grands photographes, j’avais l’impression qu’ils mettaient des années à acquérir une technique impeccable, se rappelle Souleymane Bâ, en fait c’était plus naturel, ils sortaient dans la rue et prenaient ce qu’ils avaient sous les yeux. Cartier-Bresson, par exemple, ne développait pas ses photos lui-même ».

Portraits au naturel
Malgré son succès sur les réseaux sociaux, Souleymane Bâ n’envisage pas de devenir photographe professionnel. « C’est tentant, mais j’ai encore du travail, juge-t-il, un client n’attend pas un mois pour vous laisser le temps de faire une belle photo. Il faut savoir ce que l’on fait ». Pour l’instant, il travaille sur des portraits de rue. « J’essaie de prendre les gens dans leur environnement quotidien, au travail ou dans la rue », explique-t-il. Une chose est sûre : s’il lui prenait l’envie de réunir ses clichés dans un livre, le titre en serait tout trouvé. A l’instar de Cartier-Bresson et ses Européens, Souleymane Bâ pourrait nous présenter un beau panorama de Genevois.

 

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