On sait que les genevois entretiennent une relation particulière avec « leurs » arbres. On comprend donc pourquoi, dès qu’un marronnier, un platane ou autre micocoulier de bonne taille est menacé d’abattage, certains de nos concitoyens se mobilisent pour essayer de sauver ces feuillus. Bien souvent, lors d’un « sacrifice » programmé, des collectifs et associations accusent les autorités de privilégier le développement urbanistique au détriment de la qualité de vie de ses habitants.
Heureusement, il n’y a pas que des coupes drastiques et des abattages récurrents dans nos villes du bout du lac : les magnifiques plantations autour de certaines gares du Léman Express, comme les réalisations végétalisées le long de la route de Veyrier à Carouge en sont la verdoyante preuve. Par ailleurs, en faisant un tour vers quelques actuels gros chantiers, on a pu relever plusieurs belles surprises.
Dans le quartier de Champel, à l’avenue de Beau-Séjour et à deux pas de l’hôpital du même nom, même si cette dernière est déjà éventrée par les SIG depuis plusieurs mois pour d’importants travaux sur les réseaux de distribution d’électricité et d’eau potable, on remarque en plus un gros ouvrage : il concerne la démolition de deux bâtiments, dont un de l’administration cantonale et l’ancienne clinique Beaulieu de l’époque. Et le long des montagnes de gravats, même si des haies buissonneuses et quelques arbustes ont toutefois trépassé, trois arbres se dressent encore fièrement le long de cette allée. L’historique Pavillon Louis XVI, qui trône majestueusement un peu plus loin, n’aura donc pas vu tous ses arbres voisins disparaître les uns après les autres, même si des lignées de marronniers vénérables ont déjà été rayées de la carte depuis des décennies.
Il avait également semblé dans un premier temps, dans l’énorme chantier de démolition et reconstruction des immeubles de la Cité Léopard à Carouge, qu’un monumental conifère (cèdre ?) avait aussi échappé aux tronçonneuses, pelleteuses ou autres excavatrices. Malheureusement, nous avons vite déchanté : il est finalement tombé jeudi passé, d’après un ouvrier interrogé sur place, en même temps que les derniers murs recouverts de fresques et de graffitis éphémères…
On osait espérer, à la vue de ces divers végétaux rescapés au milieu de ces grands chambardements, qu’il ne s’agissait pas simplement d’un « sauvetage » ou d’un oubli, mais que ces plantations figuraient en juste place sur les plans des futures constructions. Ce n’était donc malheureusement pas le cas sur le chantier de la Cité Léopard. Un article paru en mai dernier dans la Tribune relevait pourtant que « les autorités commenceraient enfin à prendre en compte le patrimoine végétal dès la naissance des projets » : il est temps en effet qu’on apprenne enfin à construire avec et autour des arbres existants.
En tous cas à Beau-Séjour, sur une image de synthèse de l’achèvement de la future clinique qui sera érigée à cet emplacement (service d’ophtalmologie, unité de dermatochirurgie et le centre pied-main ainsi que le futur centre de chirurgie ambulatoire, partenariat des HUG avec le groupe Hirslanden), on peut y voir des arbres déjà de bonne taille et c’est peut-être ceux qui subsistent aujourd’hui.
Une autre belle initiative, qui aide entre autres à lutter contre les effets « îlots de chaleur », c’est le développement de micro-forêts à la mode japonaise (méthode du botaniste Akira Miyawaki), qui débarque en ce moment à Genève. Il semblerait que ce programme, qui permet notamment de créer des écosystèmes forestiers résilients en milieu urbain et contribue à la biodiversité, ait rencontré un bon écho auprès de la Ville et plus particulièrement du magistrat écologiste Alfonso Gomes chargé de l’environnement.
Deux parcelles sont actuellement en phase de test : celle de la zone industrielle des Charmilles (ZIC) et la butte Sturm, pas loin du Pavillon de la danse contemporaine qui a ouvert ses portes en mars dernier. Près de 140 bénévoles ont planté 1200 arbres sur ces deux friches, installations composées essentiellement d’espèces indigènes que l’on trouve dans le canton : chênes, charmes, ormes, tilleuls, notamment pour les plus grands spécimens, aubépines, sureaux noirs, groseillers et d’autres essences régionales pour composer la strate arbustive.
Ces micros-forêts à croissance rapide sont très denses puisque trois arbres sont plantés au m2. Ces nouveaux espaces végétalisés seront comme des petits poumons verts au cœur même de la géographie urbaine et du trafic routier. Ils apporteront ainsi une meilleure qualité de vie aux habitants des différents quartiers, à l’instar des citoyens Carougeois qui profitent déjà depuis le printemps dernier de leur nouvelle route de Veyrier richement arborisée.
Et dans quelques temps, ce seront d’autres arbres qui vont s’inviter jusque dans nos salons : les sapins de Noël. Pensez donc à ceux de la Ferme Jaquet à Meinier, un produit local qui n’a donc pas parcouru des milliers de kilomètres, et de surcroît proposé en qualité bio.