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Jo Fontaine et ses stages de sculpture à Soral

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© Huguette Junod

J’ai eu le plaisir de présenter, pour Signé Genève, le travail du sculpteur Jo Fontaine (15.3.21). Cette fois, je vais vous parler de ses stages de sculpture sur pierre. La plupart des artistes, généralement amateurs, reviennent chaque année. Visiblement, ils ne s’en lassent pas. « Certains de mes élèves suivent mes cours depuis plus de vingt ans. Je n’aurais plus rien à leur apprendre, mais les échanges deviennent plus subtils, ils se nourrissent de l’acte de création, de l’intensité du moment. Alors, la qualité de l’observation crée une alchimie particulière, nous sommes dans un pur moment de poésie, c’est la magie de l’ici et maintenant. Et on rit beaucoup. Cela nous permet d’être concentré-es dans le travail de la sculpture. Je laisse une liberté absolue à mes élèves, que ce soit dans l’expression, figurative ou abstraite, mais je les aide techniquement. »

Le stage dure cinq jours, du lundi au vendredi. Jo en anime trois par été, en groupes de douze, et tient une liste d’attente. Je suis allée à son atelier lundi 8 août, pour faire connaissance, j’ai trouvé quelques femmes affairées derrière leur pierre. Ce sont encore des ébauches : un ovale en albâtre, une masse bleutée, une rose, je prends quelques photos. Puis nous nous retrouvons à l’intérieur, autour d’un verre. Je ne vois que des mines réjouies. « Quand nous sculptons, nous oublions tout le reste », m’assurent les participant-es. Visiblement, Jo Fontaine est un professeur apprécié, aimé. Nous nous donnons rendez-vous pour jeudi après-midi, afin que je puisse constater l’avancée des travaux.

Je gare mon scooter à 16 h pile et pénètre dans la cour de l’atelier, l’ancienne maison des grands-parents, qui fut aussi la première poste de Soral, dont il ne reste que les murs. Je suis admirative de l’évolution des œuvres : une madone stylisée dans une pierre récupérée, une femme toute en rondeurs, un bélier rose, une forme abstraite s’extrait d’une roche très dure qui se laisse difficilement travailler, une sphère dont l’albâtre laisse apparaître des taches sombres. Plus tard, j’admirerai une main taillée selon une maquette qui est tombée au début du stage, que Jo a réparée, et une sculpture en albâtre.

Jo Fontaine commande à une entreprise de Suisse alémanique un certain nombre de pierres d’environ 20 kg, de plusieurs sortes, qui viennent d’horizons différents : Toscane, Brésil, Iran… « Les pierres utilisées sont uniquement des pierres tendres, comme la savonnière de Bourgogne (dont est fait l’ange du Grand Théâtre), l’albâtre blanche et translucide, les différentes pierres ollaires colorées, appelées aussi stéatites. Le travail de la pierre s’effectue uniquement à la main, sans l’utilisation de machines. Il s’agit d’un processus lent qui demande un engagement sur le long terme et permet à chacun-e de se retrouver avec soi. C’est cette rencontre que nous transmettons à la pierre… »

Elles changent de couleur si on les mouille, comme il me le démontre. Les stagiaires en choisissent une, inspirés par la forme initiale, la couleur, les veines. … et le travail commence. Sont à disposition une quantité de pointes, ciseaux, burins, gouges, limes, gradines, maillets.

des années pour comprendre qu’il ne faut pas tout donner. » Il regarde, accompagne, suggère, apporte au bon moment l’outil approprié ou donne le petit truc qui permet d’avancer. Selon les artistes, sa seule présence les sécurise, les encourage, ils parlent du silence qui suit les indications. « On y va comme ça » est la phrase magique qui leur donne du punch et les met en confiance.

Jo a dressé une haute table à l’entrée de la maison vide, avec une plaque tournante, qui permet d’observer l’œuvre en travail. On m’en présente plusieurs, dont un nu féminin. Sa sculptrice me confie qu’elle se sentait bloquée dans son travail, Jo a dessiné une courbe à la craie, elle lui a coupé les jambes et obtenu cet arrondi qui la satisfait.

Il faut chercher un équilibre entre les volumes, le poli et le brut, les creux, les bosses et les plats, l’ombre et la lumière. Jo se dit attentif aux changements. Des sculptures sont parfois laissées de côté puis retravaillées des semaines, des mois, voire des années plus tard. La pièce est terminée quand on pense ne pas pouvoir aller plus loin. Après quarante ans de métier, Jo Fontaine ne se sent pas le droit d’intervenir dans le monde des stagiaires, c’est à chacun-e de trouver sa voie. Ici règne une ambiance studieuse et heureuse, qui m’accompagnera jusque chez moi.
Informations sur Jo Fontaine : Wikipédia et son site www.jofontaine.ch.

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Photo du profil de Huguette
Huguette Junod s’intéresse très tôt à l’écriture. À douze ans, elle gagne un concours radiophonique pour adultes ; dès l’âge de treize ans, elle publie des contes puis des articles dans différents journaux. Pendant 33 ans, elle est professeure de français à l’école secondaire genevoise, où elle fait connaître la littérature romande. Parallèlement, elle anime des ateliers d’écriture et organise des manifestations culturelles. En 1987, elle fonde les Editions des Sables. Elle a touché à tous les domaines : le journalisme, la chanson, le théâtre, la publicité, la poésie, le récit, la fiction, l’essai, et publié une vingtaine d’ouvrages. Huguette Junod a obtenu le Prix des Écrivains genevois en 1986 pour le récit Ceci n’est pas un livre et en 2008 pour le poème Le Choix de Médée. Depuis janvier 2013, elle écrit chaque semaine une chronique féministe dans « Gauchebdo ».

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