C’est dans les rires et les applaudissements que, mettant un voile sur sa tête devant l’Eglise Sainte-Croix, Latifa Djerbi, actrice et metteuse en scène du spectacle itinérant menant du chantier du Théâtre de Carouge à la salle temporaire « La Cuisine, s’est auto-proclamée « Sainte Latifa de Carouge » !
Elle venait de jouer, ce 13 octobre, son spectacle phare « L’Opération Farine », traitant de l’intégration, mêlant farine blanche et farine de sarrasin pour confectionner un pain savoureux. Evidemment l’élaboration de ce pain ne va pas sans difficultés, grands coups de poings et de gueule, mais finalement tous les spectateurs se levaient émus et suivaient, enchantés, Larifa à travers Carouge et à la rencontre de diverses performances, dont la plus hilarante était celle de la chorale du Club des Aînées dans le préau de l’Ecole Jacques-Dalphin, pour aboutir aux différents menus de « La Cuisine ».
Et maintenant, que fait-elle après son remarquable « voyage urbain à tiroirs humains », monté avec sa comparse Lamia Dorner et quelques collègues du Théâtre de l’Unité, spécialistes du théâtre de rue ? Se repose-t-elle enfin après cette prouesse et ces mois de création intense ?
– Non, même si elle s’avoue fatiguée, elle continue à jouer « La Danse des Affranchies » (à Ferney-Voltaire ce 24.11), puis dans le canton de Vaud, à Lausanne, à Yverdon, et enfin bientôt à Paris.
Et surtout, elle écrit… Sa première pièce « La Danse des Affranchies » vient d’être acceptée par une maison d’édition et d’être primée Textes-En-Scènes par Pro Helvetia et sera bien en évidence dans la librairie du Centre culturel suisse de Paris durant les représentations !
« J’aime écrire, cela m’apporte de l’air, de l’humour, de la distance. Je vais continuer à écrire des pièces. »
Mais son esprit et son cœur sont encore à Carouge. Elle me parle avec enthousiasme de toutes les personnes qui l’ont aidée à porter ce projet fou, notamment le chef cuisinier du Théâtre de Carouge, Thomas Cressati, qui relevé le défi de Latifa de « donner à manger à tout Carouge » et que ce soit beau et bon ! Et des Carougeois-e-s qui lors de ses ateliers d’écriture ont concocté des recettes-poèmes, réunis dans une appétissante brochure.
Latifa m’avait donné rendez-vous aux Bains des Pâquis, un jour de tempête froide et de pluie et je râlais un peu en grimpant l’escalier venté, mais la rencontre avec cette femme à la bonté, à l’intelligence, à la beauté et surtout à l’énergie magnétiques m’a transportée. Regagnant la rive, comme elle, j’avais envie de me battre contre la bêtise et de savourer la tendresse du monde