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Portrait d’une traceuse de belles lettres

Portrait d’une traceuse de belles lettres

Qui n’a pas été fasciné par ces documents du temps passé – lettres, papiers officiels, registres ou diplômes – tracés d’une main sure en lettres onciales, anglaises ou gothiques ? La calligraphie, cet art de la belle écriture, a malheureusement disparu de la plupart de nos documents, remplacée par leurs équivalents imprimés. Pourtant, quelques écoles, entreprises et certaines administrations continuent à recourir aux pleins et aux déliés de l’écriture manuscrite pour rendre le caractère solennel ou unique d’un document. Rencontre avec Christiane Friess, calligraphe professionnelle qui perpétue l’art de la belle écriture.

C’est à Croix-de-Rozon dans son salon reconverti en partie en atelier de calligraphie que j’ai rencontré Christiane Friess, fringante sexagénaire au regard profond. Cette femme chaleureuse à la personnalité ouverte et souriante me raconte comment sa passion du beau l’a amenée à l’art de l’écriture. Dans sa jeunesse, elle aurait souhaité faire une formation de décoratrice d’intérieur. Cependant dans sa famille d’origine italienne, seuls les garçons faisaient des études ; c’est donc un métier manuel, la coiffure, qu’elle apprend. Elle ne s’en plaint d’ailleurs pas : son métier lui permet de travailler pour la TSR, la comédie de Genève et même de coiffer les mannequins lors de défilés de mode. Malheureusement, une intoxication due aux produits de coiffure la force à se recycler dans des postes administratifs, moins risqués pour ses poumons.

Passionnée par les plumes anciennes, et par tout ce qui touche à l’écriture, Christiane Friess collectionne les beaux objets et se met petit à petit à la calligraphie, d’abord en se formant dans des livres puis en suivant des cours. C’est grâce à sa fille qu’elle devient calligraphe professionnelle. En effet, collaboratrice à la Chancellerie d’Etat, celle-ci a appris que le calligraphe officiel est malheureusement très malade et cherche un successeur. Deux personnes ont déjà tenté leur chance mais aucune n’a convenu. Christiane Friess se propose.

L’apprentissage est rude : durant les deux premiers mois, M. Morel – le calligraphe de la chancellerie – lui demande de faire simplement des bâtonnets, des bâtonnets à l’infini. Mais l’apprentie ne lâche pas. Au moment de passer le relai, le vieux monsieur de 72 ans la recommande chaudement et écrit aux différentes entreprises qui ont régulièrement recours à ses services qu’il lui transmet le flambeau – ou dans le cas présent, la plume. Au cours des années, elle travaille en parallèle pour la Ville de Genève, la chancellerie d’Etat, des écoles et des entreprises de renom. Mais le rouleau compresseur de l’informatique et ses milliers de polices de caractères ont petit à petit raison du goût de la belle écriture manuscrite. Il faut dire que la calligraphie requiert un travail parfait et une mise en page exemplaire, ce qui demande temps et patience. Pour quelques lignes d’écriture, il faut facilement plusieurs heures de travail.

Aujourd’hui, en tant qu’indépendante, elle réalise encore une quinzaine d’inscriptions par mois pour la chancellerie d’Etat et des entreprises de renom. Il lui arrive également de calligraphier des documents exceptionnels comme le diplôme des disciples d’Escoffier, une association qui réunit des cuisiniers du monde entier. Christiane Friess espère continuer son activité aussi longtemps que ses prédécesseurs qui ont réalisé des travaux de calligraphies jusqu’aux âges respectables de 72 et 81 ans.

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Photo du profil de Anne Pastori Pastori
Anne est aux premières loges pour assister au développement fulgurant de sa commune de Plan-les-Ouates. Elle s’intéresse particulièrement à «ce mélange fascinant entre la campagne et l’évolution urbaine qui fait apparaître de nouvelles problématiques.» Experte en communication et réseaux sociaux, passionnée par le graphisme, elle réside et participe à la vie publique de Plan-les-Ouates depuis près de quinze ans.

5 commentaires

  1. Salut,
    Un grand bravo à toi pour ton parcours ! Cet article est une belle consécration à ton art ; )

    Bisou

    Céline

    Répondre
  2. Bravo maman, je suis fière de toi et de ton travail d’artiste qui est toujours de grande qualité, méticuleux et consciencieux, c’est juste magnifique !

    Répondre
  3. Magnifique clin d’oeil à cet art et à l’artiste que j’ai la chance de connaitre personnellement. En plus de faire de belles choses c’est une belle personne et c’est probablement le secret de son talent.
    Il ne suffit pas de savoir tracer des belles lettres, il faut aussi le faire avec le coeur et y mettre une partie de son âme pour arriver à un résultat aussi parfait. Bravo Christiane, je te souhaite encore quelques belles décennies à nous ravir les yeux de ton talent 🙂

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  4. Bonjour Anne Pastori,

    c’est tout à son honneur de réaliser des calligraphies et j’en suis ravie.

    Cependant, moi aussi j’en fais et j’attire votre attention que Mme Friess ne travaille plus depuis 3 ans pour les Livres d’or à la Ville de Genève. J’avais pris la relève lors de son départ à la retraite.

    Je me permets par ce commentaire de demander un démenti sur ce sujet.

    Entre autre j’enseigne cet art de la belle écriture dans plusieurs écoles.

    Bien à vous
    cordialement

    Dominique Zaugg, graphiste, illustratrice, calligraphe.

    Répondre

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