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Visibiliser les « enfants aidants », le projet du collectif éponyme

Muriel et Florian, lors de notre échange fin octobre à Plainpalais
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Muriel et Florian, lors de notre échange fin octobre à Plainpalais

Entre Genève et le canton de Vaud, un collectif s’est créé en vue d’œuvrer à la prise en considération des enfants qui vivent avec un parent en situation de vulnérabilité psychique. Témoignage.

2015, Haute école de travail social de Genève. S’y rencontrent Muriel Vial et Florian Sallin – interviewés pour cet article –; tous les deux se trouvent à ce moment dans une démarche de reconversion professionnelle. Au cœur de cette rencontre, un « feeling commun », en lien avec l’expérience partagée d’une enfance au contact d’un parent en proie à une vulnérabilité psychique – terme qu’on emploiera ci-après, car moins stigmatisant que d’autres, à l’instar de psychotique, m’indique Muriel. Ils abondent alors vers le même constat: la prise en compte de cet enfant et de sa posture d’accompagnant est inexistante dans le logiciel socio-institutionnel du soin à autrui, c’est en quelque sorte un impensé.

« On aimerait offrir notre expérience, notre vécu, notre regard. » (Florian)

Germe de là l’idée de faire bouger les choses, de porter ce sujet et de soutenir la « cause des enfants ». En suit la création du collectif « enfants aidants » en 2021. « Ça part d’un sentiment de solitude, d’une incompréhension de la part du grand public » rebondit Florian. Il soulève que l’ « enfant peut avoir une expertise sur la maladie, mais qu’elle n’est pas forcément prise en compte ». Muriel complète avec le postulat qu’ « il faut reconnaître que l’“enfant fait” ». Aujourd’hui, les « proches aidants sont ainsi nommés (et donc reconnus) à partir de l’âge de quinze ans seulement » renchérit-elle.

Enfants aidants a pour finalité première de sensibiliser des publics, professionnels et acteurs variés sur cette thématique. À ce titre, les quatre membres fondateurs, Aurore, Muriel, Sophie et Florian, rejoints entre temps par trois nouveaux associés, entretiennent des liens avec différents partenaires associatifs et institutionnels. Ils interviennent notamment auprès d’étudiants dans le domaine du médical et de la santé et dans des groupes de travail thématiques, m’explique-t-on. Lorsque Muriel précise que « l’idée n’est pas de remplacer le professionnel », Florian ajoute que l’objectif est de « donner des outils aux “adultes” (…) afin que ceux-ci soient en mesure de mieux orienter ». « Il est important de déceler, d’identifier ces jeunes », rajoute encore mon interlocutrice. Enfin, une logique de marrainage/parrainage à l’égard d’enfants aidants est envisagée pour l’avenir. Sur ce dernier point, Florian me présente un témoignage provenant de son activité d’éducateur. Il me dit avoir travaillé avec une jeune fille vivant avec une mère schizophrène; celle-ci lui aurait partagé des choses « dures à dire et à entendre ». « On manquait d’empathie à son égard (…), j’ai pu lui partager mon expérience, et aujourd’hui elle n’a plus honte de ce qu’elle ressent. »

« S’engager la dedans aide à se réparer »

Au cœur de ce projet, rappelons que ses forces vives ont tous éprouvé cette posture de support envers un parent souffrant de maux psychiques. Si payer des factures, contacter un médecin en urgence et lui faire face constitue un geste plutôt anodin pour tout un chacun, il n’en est pas de même lorsque l’on agit en tant qu’enfant pour un parent souffrant. Muriel évoque à ce titre une forte « lourdeur émotionnelle » et une pénibilité qu’elle a vécu. Florian quant à lui déplore de ne pas « avoir eu de soutien, d’aide apportée », ainsi que la prégnance de la « peur de mal faire ». Les révélations de ces deux, pudiques, me font alors réaliser la portée réflexive et thérapeutique que revêt cette initiative. Muriel, par exemple, a à cœur de s’interroger sur « où se situe chaque membre dans sa réparation », tandis que Florian reconnaît que « s’engager la dedans aide à se réparer ».

Malgré une prise en compte lacunaire des enfants aidants, ce sujet suscite néanmoins de plus en plus d’attention. Ainsi, les personnes proches aidantes sont mises à l’honneur la journée du 30 octobre dans neuf cantons, comprenant l’ensemble des cantons latins. Cet événement, qui se déploie en fait entre octobre et novembre, vient résonner avec ce qu’appelle Muriel, soit une « collaboration intercantonale forte, en Romandie ». « Considérer pleinement l’“enfant” dans ce système » me glisse une dernière fois Florian… un projet censé, et dont réussiront à s’emparer, souhaitons le, publics et institutions concernés.

Post-scriptum: le collectif se met à disposition de « qui veut les écouter »; il cherchent des fonds par ailleurs (contact: info@enfants-aidants.ch).
Le programme des événements genevois de la « journée intercantonale d’engagement en faveur des personnes proches aidantes » (les 1er (Carouge), 9, 10, 14 et 24 novembre) est accessible via le lien https://www.journee-proches-aidants.ch/evenements/

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Photo du profil de François-Florimond Fluck
Au cœur de ma démarche dans Signé Genève, la récolte de matériaux de terrain: expertise d'usage, initiatives inspirantes et/ou détonantes... Et puis je propose des "traductions" de ces matériaux, c'est à dire que j'essaie d'écrire une histoire "journalistique" avec ce qu'on me confie, et d'en révéler une certaine teneur.  A votre service!

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